
L’article « Participation, de la pratique à la théorie » est suivi de trois témoignages de participants de la session de formation qui s’est déroulée à Khémisset au Maroc. Les voici donc…
Témoignage marocain…
Une formation unique dans la méthode et si loin de ce que nous connaissons habituellement, car elle nous a permis de découvrir l’autre à travers moi-même. Grâce à cette formation, j’ai rencontré d’une autre façon des gens avec lesquels j’ai travaillé.
J’ai découvert la manière dont ils réagissent face à leurs problèmes et leurs façons de vivre. Cela nous demande une grande patience et une capacité importante d’écoute, d’observation et de négociation avec eux en respectant leur rythme de vie et leur environnement.
En tant qu’animatrice, au cours de la formation, j’avais l’honneur d’être parmi une majorité d’homme, pour représenter la femme, son existence, son intégration et sa participation au développement de la société.
Après la formation, j’ai conclu que rien ne peut changer le monde sauf la participation de tous.
Badija Youlnouz.
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Témoignage égyptien...
“J’ai compris finalement la RAP!”. Je voulais commencer avec cette phrase car il y a longtemps que j’entends parler et discuter de cette méthode sans rien comprendre, mais enfin j’ai eu la chance et l’occasion de la comprendre au Maroc cette année… C’était une expérience tout-à-fait nouvelle pour moi.
J’avais fait des études de sociologie pendant 4 ans, j’ai appris beaucoup de méthodes de recherche mais aucune d’entre elles ne touchait vraiment les groupes cibles ni n’avait un contact aussi profond avec eux comme le faisait la RAP. Peut être je n’étais pas d’accord avec toute la démarche, peut être aussi, j’ai rencontré quelques obstacles concernant les groupes cibles mais finalement j’ai pu vivre la méthode à fond d’une façon très concrète et pratique, pas simplement théorique. Ce que j’ai apprécié le plus était surtout qu’on vivait chaque étape ensemble, on n’avait pas un guide ou un livre pour nous donner les réponses, on vivait l’étape, on revenait, on discutait et on trouvait les réponses.
J’ai finalement compris la RAP, mais aussi c’est toute une démarche à revivre et à essayer pour que je puisse réellement sentir son effet. Je vais essayer, cette année, d’en réaliser une avec les jeunes pour les inciter à créer leur propre projet. Je crois que ça va être une bonne expérience !
Roger Macar.
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Témoignage belge…
Une chute libre. Un sentiment de liberté totale, de délivrance. La délivrance du devoir d’être un Dieu parmi les hommes, du devoir de repenser leurs rêves, du devoir de refabriquer leur monde à son image. La délivrance aussi d’un malaise profond et sourd, entretenu au fond de soi par l’apparente ingratitude des hommes.
Mais un sentiment d’abandon aussi, de solitude. Le sentiment dévorant d’être en équilibre sur le bord d’un précipice, quelque part, oublié dans l’espace et le temps, avec le risque omniprésent de trébucher et attendant même, comme une délivrance, le moment de la chute.
Ce temps d’attente, c’est le temps d’avant la création – la vraie, celle qui crée des mondes, des rêves, des univers, celle qui fait exister Dieu, celle qui procure une joie profonde.
Dieu, c’est l’animateur. Mais l’animateur n’est pas toujours celui que l’on croit, les apparences sont trompeuses. L’animateur, c’est l’homme. Ne dit-on pas que Dieu a fait l’homme à son image ou encore qu’Il s’est fait homme ?
La chute et la liberté, la joie et la solitude appartiennent à un animateur mort, puis ressuscité. Mais c’est l’homme – le nouvel animateur, Dieu – qui lui procure ces sentiments. C’est lui qui le ressuscite par la force de sa création.
C’est ça, la RAP – abréviation poétique de Recherche Action Participative : une longue ascension de l’homme, un sentiment puissant, une force poussant à créer, à redevenir maître de son existence, à renverser ses anciens dieux.
C’est chez eux que tout commence pourtant. Le destin de l’ancien animateur est de s’oublier, de mourir pour renaître avec la révélation de l’exorbitante prétention qui l’habitait quand il pensait pouvoir créer. Les seuls qui ont jamais su créer, ce sont les hommes, ces dieux que l’animateur n’a jamais voulu considérer, mais qui créent chaque jour pourtant, sans attendre son approbation (et Il vit que cela était bon).
La RAP se passe dans le cœur et l’esprit de l’animateur ressuscité. C’est là, en effet, que se vit la renaissance de l’animé – cet être légendaire que l’animateur voulait pouvoir modeler à son image et sortir de la condition d’inanimé dans laquelle il se plaisait à le maintenir.
La RAP, c’est le retournement des paradigmes, c’est Jésus lavant les pieds de la prostituée, l’animateur apprenant l’humilité et s’inclinant devant la force de l’homme qui a su lui rendre la vie.
Charles-Albert de Radzitzky.