Depuis quelques années, dans le bureau d’Action Jeunesse & Environnement (AJE), se trouvait une grande bâche qui décrivait les étapes de la recherche-action. A chaque fois, j’avais envie de lui mettre un grand coup de canif au bas de cette affiche. Tout était juste sauf qu’il y avait une inversion dans deux des 9 étapes que contient la méthode participative.
J’avoue qu’en 2025, lors de mon dernier passage à AJE, je me suis armé d’un gros magicolor et j’ai corrigé l’erreur. Evidemment, AJE ne pouvait pas laisser cette affiche dans cet état. Donc, la coordinatrice de l’association, Judith Mukamana a relancé le graphiste qui était, en réalité, Robert Sibomana fils de René. Fort heureusement Robert avait gardé l’original dans son ordinateur. Les changements ont pu avoir lieu.
Une nouvelle bâche est en train d’être produite à Dakar pour remettre à niveau le contenu avec quelques améliorations ou précisions. Au vu du déménagement de AJE, il fallait mettre les nouvelles cordonnées. On y a ajouté celles du Réseau RAP.
Voici donc les 9 étapes
De l’étape 1 à 5, nous sommes tous bien d’accord que cela se déroule ainsi. Mais la sixième a été inversée. L’étape 6 est bien la formulation de l’action et la septième étape est celle de la restitution. Il est important que le groupe formule l’action qui va résoudre ses problèmes de groupes et non pas la communauté qui va le pousser à accomplir une autre action qui n’a rien avoir avec le cheminement du groupe.

Par contre l’étape 8 et 9 sont effectivement dans l’ordre. Il est normal de faire une évaluation de l’action et ensuite une capitalisation de la démarche qui a été accomplie. Cette capitalisation est le moment d’appropriation de la méthode par le groupe. D’ailleurs, l’étape 8 qui est l’évaluation pourrait induire éventuellement, pas toujours, l’étape 10. Celle qui n’a jamais été prévue par les fondateurs de cette méthode.
En fait, il y a bien 10 étapes
Pourtant, durant mes animations en tant que facilitateur de la méthode, cela m’est arrivé de redémarrer une recherche-action avec le groupe qui voulait aller plus loin dans sa démarche. René m’a expliqué que ce n’est pas normal qu’un groupe demande de nouveau de faciliter une recherche-action alors qu’il a suivi la restitution et la capitalisation. Donc, il a compris le cheminement qu’il a vécu précédemment.
Un jour, un groupe de jeunes m’a signalé que c’est impossible pour un des membres du groupe de faciliter la méthode alors qu’il fait partie du groupe, voire du problème. En cela, il avait raison. Aucun membre du groupe ne peut assurer une recherche-action qui le concerne.
D’où cette idée qu’il pourrait y avoir une 10e étape qui est de recommencer une recherche-action à la demande du groupe. Cette étape ne peut exister que si le groupe n’arrive pas trouver de consensus pour résoudre tous les problèmes.
Nous savons que lorsque le groupe fait la liste de tous les problèmes, il faut qu’il en dégage un qui aura la plus grande influence sur les autres problèmes. Il travaillera sur ce problème pour arriver à une solution. Cela n’empêche pas que des problèmes qui ont été soulevés ne soient pas résolus. Ces problèmes peuvent resurgir un peu plus tard,
Ce serait dommage que le groupe explose pour un problème non résolu qui, sommes toute, était peut-être plus important sans que le groupe ne s’en rende compte. Le facilitateur doit être attentif à cette possibilité de reprise d’une recherche-action qui commence alors dès la deuxième étape. Dans la négociation, le facilitateur doit alors prévenir le groupe que ce sera sa dernière mission de facilitation… ou pas ! Il faut qu’il soit clair avec le groupe sur ce point-là.
Vers une formation de facilitateur ?
Refaire une seconde recherche-action avec un groupe est aussi une manière de mieux former les futurs facilitateurs qui pourront agir dans leur milieu, communauté, village, associations, etc. C’est aussi une manière de pérenniser la méthode au sein d’une communauté, histoire que la méthode ne soit pas perçue comme un coup d’essai, sans lendemain.
Peut-être que cette dixième étape est celle du désir pour certains d’être formé pour devenir facilitateur à leur tour. Plus tard, ils deviendront formateurs de facilitateurs. C’est d’ailleurs ce chemin là qu’à pris l’association belge Asmae, celle de former des formateurs de facilitateurs… C’est ce qui manque clairement dans la pérennisation de cette méthode. Que se passera-t-il quand tous les fondateurs ne seront plus là…
Géry de Broqueville
